Epis de Cayeux : mardi 6 octobre 2015 : Julie Lopes-Curval

Souvenez-vous....

En 2011, nous avions personnellement contacté Julie Lopes-Curval, réalisatrice et scénariste, qui avait tourné à Cayeux le film Bord de Mer.

Julie Lopes Curval fut Caméra d'Or au Festival de Cannes de 2002 et elle vient de recevoir le prix de la meilleur réalisation pour L'Annonce au Festival de la Fiction TV de La Rochelle 2015.

Notre marraine nous avait envoyé un texte de soutien que nous avions publié sur le blog de l'Association de Défense des Propriétaires en Bâti de Cayeux et ses Annexes. (Toujours disponible).

A la grande réunion publique, nous avions immédiatement demandé la parole pour lire ce très beau discours. 

La salle (600 personnes) l'avait ovationné.

Nous n'hésitons pas à la republier aussi ici. Il a gardé toute son actualité.

La première fois que j'ai vu Cayeux, j'ai été touchée en plein coeur par la beauté de cette petite ville, beauté modeste et sauvage... Elle est devenue le personnage principal de mon film Bord de Mer.

Je n'ai pas cherché à la déguiser pour l'embellir, je l'ai filmée telle que je la voyais, mélancolique... la mélancolie n'est pas une pose, c'est quelque chose de lourd et dont on guérit...Avec ses ruelles modestes et coquettes, la jolie attention que chacun portait à sa maison pour que chacune soit bien nommée, Cayeux avait l'air de vouloir être heureuse, mais c'est comme si un petit quelque chose la retenait. Peut-être était-elle trop impressionnée par la somptuosité de sa plage, à qui elle a pourtant offert une allée de gracieuses cabines.

Et voilà que cette plage devient sa menace, son danger.

Je ne connais rien de beau qui ne soit en danger, et qui par là même mérite d'être protégé. Cayeux mérite d'être à la mesure de son paysage, de trouver la force de lui répondre.

Cayeux est une ville qui pourrait redevenir un lieu privilégié, je l'ai toujours pensé, rares sont les endroits qui possèdent tant de beauté à portée de jambes, la lumière y est d'une douceur enveloppante, l'horizon et l'étendue sont une pléiade de poèmes.

Proche de Paris, je m'étonne qu'elle ne se soit pas davantage déployée, et il me semble, sans la dénaturer, qu'elle doit se développer, plutôt que de se retrancher, prendre des risques plutôt que d'avoir peur.

C'est pourquoi je réponds à l'appel de ceux qui se battent auprès d'elle pour espérer que les pouvoirs publics agissent et préservent cette station balnéaire....

La proposition actuelle du PPRN ressemble au diagnostic d'un médecin incompétent qui condamnerait quelqu'un porteur d'une maladie non encore déclarée sans savoir si cette maladie arrivera un jour d'une part, et sans penser, si elle doit se déclarer, qu'on aura entre-temps trouvé des solutions pour la soigner.

La situation à laquelle Cayeux doit faire face concerne l'avenir de beaucoup d'endroits sur la planète, pourquoi ne pas se servir de cette menace pour expérimenter des solutions ici et en faire un lieu de modernité, renforcer ses habitats s'il le faut, construire autrement...

Pourquoi ne pas la guérir plutôt que de la punir ?

Si les galets doivent la soutenir, je me range de leurs côtés, s'il faut sacrifier un peu de ce que cette plage trop généreuse offre chaque année à ses usines pour aider au renforcement des épis, le choix me semble naturel.

Il me semble, vu de loin, que le dialogue a manqué, et que cette menace, réelle ou pas, peut devenir un formidable tremplin pour penser l'avenir de la ville.

Julie Lopes-Curval

 Eulalie Steens